Monsieur le Ministre,
Nous avons pris connaissance avec beaucoup d’attention de votre intervention sur la problématique de l’attrition du logement.
Il nous apparait donc nécessaire de remettre les choses en perspective sur un sujet plus complexe qu’il n’y paraît, et d’attirer votre attention sur les effets désastreux que des décisions fiscales hâtives pourraient avoir sur certaines régions touristiques, et en particulier sur les stations de montagne.
Les locations touristiques s’inscrivent en effet dans une fiscalité particulière. Ces dispositifs sont le prolongement d’une politique de développement de notre secteur qui a commencé après la seconde guerre mondiale. Cette pépite de croissance, que le Général de Gaulle avait voulue, a permis alors de relancer rapidement l’emploiet la création de richesse tout en surfant sur l’héritage de la création des congés payés.
La France a ainsi fait le choix en son temps d’en appeler à l’épargne des Français pour développer en un temps record une offre structurée et qualitative. Ces particuliers investisseurs ont permis la constructiond’un grand nombre de logements touristiques, soutenant par là même le secteur du bâtiment, et créant uneactivité forte sur des territoires qui ne bénéficiaient souvent pas d’activité artisanale ou industrielle alternative.
Mieux, dans certains territoires, en particulier dans nos territoires montagnards, elle a même stoppé ou évité l’exode rural que la France a connu, permettant ainsi de conserver une part importante de nos agriculteurs grands défenseurs de la biodiversité et de nos produits du terroir.
Depuis des décennies, les gouvernements successifs, le vôtre inclus, ont lutté contre les fameux et désastreux « lits froids », et tenté d’inciter les propriétaires sortis du marché de la location à remettre leur bien en état pourcontribuer à la vitalité des territoires touristiques.
Les propriétaires de résidences secondaires ainsi que toute l’économie touristique qui résulte de la fréquentation touristique ne doivent pas être les victimes d’une réforme construite dans la précipitation.
Demain si nous changeons de cap, dans la très grande majorité des cas, cela ne rendra pas ces appartements disponibles pour la location aux résidents. Le propriétaire qui séjourne dans sa résidence secondaire quelques semaines par an, ne louera pas son bien à l’année, si bien que nous risquons de renvoyer ces propriétaires au « marché noir » des locations sans aucun contrôle (notamment via d’autres plateformes de mise en contact moins scrupuleuses).
C’est un fait, certains territoires, principalement urbains, subissent une progression des locations touristiques.Mais la situation de Biarritz n’est pas celle de la Grande Motte, La Plagne n’est pas Les Angles et Annecy nese confond pas avec Lyon. Il faut fournir à chacun de ces territoires les outils adaptés pour se prémunir de multi-investisseurs lorsqu’ils investissent au détriment du territoire mais il ne faut surtout pas déconstruire ladeuxième industrie du pays qui emploie plus de 2 millions de personnes.
Oui Monsieur le Ministre, il faut peut-être plafonner certains avantages ou les soumettre à la sagacité des élus locaux, qui sont les mieux placés pour les adapter aux besoins de leur territoire. Mais la question essentielle est de savoir pourquoi beaucoup parmi ces nouveaux loueurs de tourisme fuient la location annuelle ? Les propos de la Première Ministre faisant le constat de la sur taxation des loueurs d’immeubles nous semblent à cet égard plein de bon sens.
Nous devons pouvoir favoriser la location des résidents qui sont en droit d’attendre un logement tout en préservant la richesse de l’offre touristique existante de notre pays, première destination touristique mondiale.
Pascale BOYER, | Jean-Luc BOCH, | Alex MAULIN, |
Présidente de l’ANEM | Président de l’ANMSM | Président de DSF |
Députée des Hautes-Alpes |